lundi 21 juin 2010

Malachie 2,10 à 16

L'ALLIANCE ROMPUE

1. INTRODUCTION :


Après avoir dressé le procès des prêtres et défini la part de responsabilités qu’il leurs revenait dans l’état moral et spirituel de la nation, Malachie se tourne maintenant vers le peuple pour stigmatiser l’infidélité par laquelle l’unité du peuple de Dieu se trouve brisée et l’alliance avec son Dieu profanée. Si les responsables spirituels d’une entité sont les premiers à qui Dieu demande des comptes pour l’état de celle-ci, ils ne sont pas les seuls à devoir le faire. Chacun à son niveau est responsable devant Dieu des décisions qu’il prend et des actes qu’il commet. Quand bien même des responsables ne seraient pas à la hauteur de leur vocation, leurs défaillances ne justifient pas pour autant les péchés et les écarts de conduite du peuple. Toute l’histoire du peuple d’Israël et de l’Eglise témoignent du fait que le péché toléré d’un seul membre du peuple suffit à porter un coup fatal au témoignage de l’ensemble et à la bénédiction de Dieu sur tous : Josué 7,1.11-12 ; Actes 5,1 à 6 ; 1 Cor 5,1 à 5. Quelle incidence a le péché d’une personne sur le tout ? Où commence et où s’arrête la liberté de choix d’un membre du peuple de Dieu ? C’est à ce type de questions que le passage de la prophétie de Malachie répond.

2. L’APPARTENANCE : LE PRINCIPE SPIRITUEL DE BASE : v 10

Comme il l’a fait au 1er chapitre à propos des prêtres, c’est par deux questions que Malachie introduit l’interpellation qu’il adresse aux membres du peuple concernés par le péché qu’il va dénoncer pour les amener à réfléchir selon Dieu à leur conduite. Les deux questions posées par Malachie ne présentent aucune difficulté quant à leur réponses. Celles-ci sont d’une évidence telle qu’il paraît presque absurde de les poser.

Le fait que l’évidence est le mode par lequel le prophète opère pour amener ses contemporains à la réflexion sur leur conduite n’est pas le fait du hasard. Ce fait témoigne tout simplement du fait qu’il est impossible pour quiconque d’entrer dans le péché sans automatiquement gommer de sa mémoire des réalités qui relèvent du bon sens. Les questions posées ici par Malachie ont un but : rappeler aux membres du peuple le cadre et les limites auxquels se heurte leur liberté :

1ère limite : en tant que membre du peuple de Dieu, nous ne sommes pas des individus isolés. Nous faisons partie d’une famille dont les membres sont rattachés par de forts liens et dont Dieu est le Père. Cette limite implique que chaque chose que je fais, et dont je me rends coupable, rejaillit inévitablement sur l’ensemble. Comme Dieu l’a dit à Josué, le péché pratiqué par l’un, quand il n’est pas jugé, est le péché de tous : Josué 7,1.10-11

2ème limite : en tant que peuple créé par Dieu, je fais partie d’une nation régie, comme toutes les nations, par des règles internes. De même que quiconque qui vit en France est sanctionné s’il vient à contrevenir aux règles qui régissent la société française, celui qui, au nom de sa liberté personnelle, contrevient aux règles de la nation sainte à laquelle Il appartient, et dont Dieu est la tête, mérite d’être sanctionné : 1 Pierre 2,9.

Avant la prière de Jésus pour les Siens précédant Son départ, Malachie remet en valeur le principe évident, mais oublié, selon lequel c’est l’unité du peuple de Dieu dans l’obéissance à Dieu et la soumission à Sa volonté qui est la garantie de la durabilité de Sa bénédiction sur lui. Dans l’état dans lequel se trouvait la nation au moment où parle Malachie, il était impossible à Dieu d’écouter leurs prières et d’agréer leurs sacrifices : v 13.

Comme il en a été dès le début, Malachie rappelle au peuple de Dieu que, encore et toujours, les péchés conscients que nous pratiquons, dans lesquels nous persévérons et desquels nous refusons de nous séparer, sont et restent le principal obstacle à l’exaucement par Dieu de nos prières : Psaume 66,18. Si Dieu, nous connaissant, ne s’attend pas à trouver au milieu de nous un peuple parfait, sans péché, ce qu’il ne peut accepter par contre est son installation sans réaction au milieu de nous : un état de fait que Pierre ne supporta pas à Jérusalem et Paul à Corinthe : Actes 5,1 à 6 ; 1 Cor 5,1 à 5.

L’Eglise ne doit jamais, en aucun cas, être un lieu semblable à celui dans lequel vivaient les chèvres de Robison Crusoe : leur enclos était si vaste que celles qui se trouvaient à l’intérieur étaient aussi sauvages que celles de l’extérieur. Deux sphères nettement différentes existent :

- la 1ère est celle du Royaume de Dieu dans laquelle la liberté de chacun est soumise à la volonté de celui qui en est le Chef

- la seconde est celle du monde, dont le prince est le diable, autorité visible dans les actes et les attitudes de ceux qui en sont membres : Jean 8,44

C’est par nos actes que nous témoignons du Père et du Chef auquel nous appartenons !

NOTA : Importance et réalité du sentiment d’appartenance :

Le sentiment d’appartenance est le fait de se sentir pleinement intégré dans un groupe. Ce sentiment dépasse le simple fait d’être un membre physique du groupe. Il implique une identification personnelle aux références du groupe : à son identité, ses valeurs, ses normes, ses habitudes. Le sentiment d’appartenance est renforcé par les attaches affectives personnelles, le sentiment et les actes de solidarité envers les autres membres et la considération mutuelle.

Le sentiment d’appartenance est le fondement de la cohésion de la vie d’un groupe et de son esprit d’équipe. Il s’exprime visiblement par le fait que les objectifs du groupe priment sur les buts personnels et que les succès comme les échecs du groupe sont aussi ceux de chacun. C’est le sentiment d’appartenance à un groupe qui fait que chacun y trouve sa place sans heurts avec les autres. La part irremplaçable de l’un est complété et dépendante de la part irremplaçable de l’autre, dans le seul but du service de la collectivité toute entière.

3. NATURE DES PECHES D’INFIDELITE :

Après avoir rappelé les principes qui conditionnaient les relations des membres du peuple entre eux et avec Dieu, le prophète en vient aux faits commis, faits synonymes à ses yeux de trahison entre eux et de rupture d’alliance avec Dieu :

1er fait : le mariage des israélites avec des femmes étrangères : v 11

Notons que si Dieu s’oppose à de telles alliances, ce n’est en aucun cas pour des critères raciaux, mais uniquement pour des raisons spirituelles. Comme il le dit dans la loi, ce que Dieu craint, en voyant un israélite épouser une païenne, c’est que celle-ci le conduise à se détourner de Lui pour l’amener à adopter ses dieux : Deut 7,1 à 4. La preuve que la crainte de Dieu à ce sujet était fondée sera donnée par l’exemple même de Salomon, un des hommes pourtant réputés les plus sages de tous les temps : 1 Rois 11,1 à 8. A l’opposé de cet exemple, Dieu Lui-même donnera à Rahab et Ruth, deux femmes d’origine païenne, ayant abandonné leurs dieux pour s’attacher à l’Eternel, de faire partie de la lignée du Christ : Mat 1,5.

Il est courant d’entendre parmi les enfants de Dieu l’argument selon lequel le fait d’épouser un non croyant peut aboutir à l’heureuse conclusion de la conversion de celui-ci. Si la grâce de Dieu peut le permettre, jamais la Bible ne soutient un tel point de vue. L’expérience, au contraire, tend à prouver l’inverse : succombant à l’attrait qu’exerce sur lui l’incroyante, c’est le croyant faible qui s’éloigne de Dieu plutôt que l’incroyante qui s’en approche !

En quoi, le fait pour un membre du peuple de Dieu d’épouser une femme étrangère, adoratrice d’une autre dieu, est-il une trahison envers ses frères et un acte de rupture à l’alliance de Dieu ? Plusieurs raisons :

1. L’union est vécue par Dieu comme une profanation de ce qui est sacré : v 11b. L’enfant de Dieu, dit Paul, est un membre de Christ et son corps le temple du Saint-Esprit. En s’unissant à une incroyante vouée à l’idolâtrie, le croyant s’engage dans une alliance contre nature qui porte atteinte au caractère même de Dieu : 1 Cor 6,12 à 20. C’est pourquoi Paul indique que si le chrétien, suite à sa conversion, peut se séparer de son épouse incroyante, il ne peut se remarier qu’avec une croyante : 1 Cor 7,12 à 15.39.

2. L’union d’un croyant avec une incroyante porte préjudice au témoignage de Christ et l’affaiblit dans l’église. Si, déjà, le mariage est une condition qui oblige les époux à s’adapter l’un à l’autre, parfois au détriment du Seigneur : 1 Cor 7,32 à 35, combien davantage ce partage, qui diminue la part consacrée au Seigneur, sera-t-il une réalité dans un tel cas de figure ! L’idée que le croyant transmet à l’incroyante en l’épousant est que, certes, les commandements de Dieu existent mais que, finalement, ils n’ont que peu d’importance. Ce n’est pas à lui seul, mais aussi à sa conjointe que, sur le plan spirituel, le croyant nuit.

3. L’union d’un croyant avec une incroyante a des répercussions inévitables sur leur descendance commune. Au lieu d’engendrer des enfants éduqués dans la foi, c’est un foyer déchiré et divisé que, inévitablement, les époux offrent à leur progéniture. Comment, dans ce cas, le père pourra-t-il éduquer les enfants selon le Seigneur : Ephés 6,4 et leur inculquer les valeurs de la Parole de Dieu : Deut 6,6-7

4. L’union d’un croyant avec une incroyante témoigne du fait que ce qui l’a attiré vers elle n’avait rien à voir avec le Seigneur auquel il appartient, mais ne provenait que de considérations humaines et charnelles. S’il n’y avait rien de Dieu en elle, il faut se poser la question de savoir de quelle nature était ce que le croyant a aimé en elle au point de l’épouser : Prov 5,20 à 23.

2ème fait : la banalisation du divorce comme préalable au mariage des israélites avec des femmes étrangères : v 14

Un péché ne venant jamais seul, Malachie en vient maintenant à ce qui, en son temps, représentait aux yeux de Dieu le comble de la trahison, de l’infidélité et de la rupture du contrat d’alliance qui, par ses obligations, liait le peuple de Dieu à son Dieu : le divorce.

Si, rappelons-le, la cause de tous les désordres qui étaient dans le peuple venait du fait que celui-ci avait oublié qu’il devait vivre comme une famille dont Dieu était le Père ou une nation sainte dont Dieu était le Créateur : v 10, c’est dans le cadre de la famille humaine, et plus particulièrement des liens sacrés qui fondaient le mariage que cet oubli était le plus criant. Il peut nous arriver, comme Israël, de continuer à exister en tant que peuple de Dieu, de nous considérer même, en tant qu’Eglise, comme une famille dont les membres sont, à nos yeux, comme de vrais frères et sœurs. Malachie nous prévient : nous sommes menteurs aux yeux de Dieu si cet esprit de famille que nous voulons montrer au monde ne se traduit pas dans le cadre des liens de notre propre foyer.

C’est vu sous cet angle que Malachie nous transmet, de la part de Dieu, comme aucun autre passage de l’Ecriture ne le fait, Sa vision du divorce. Il nous dit de Sa part trois choses à ce sujet :

1. le divorce d’un mari est une trahison de l’engagement pris lors du mariage envers la femme avec qui il s’est lié devant Dieu.

Pour nous faire sentir le degré auquel atteint cette trahison, Malachie donne un double titre à la femme à laquelle les liens du mariage nous ont attachés :

- c’est la femme de ta jeunesse, celle qui, dans les meilleures années de la vie, s’est offerte à toi et qui a fait toute ta joie : Prov 5,15 à 20. Est-il juste, maintenant qu’elle a porté tes enfants, qu’elle a tant fait pour toi et ton bonheur que, parce que les années ont passé, tu la rejettes pour une autre plus attirante à tes yeux ? Avant d’être une rupture, le divorce est d’abord aux yeux de Dieu la marque d’une profonde ingratitude et d’un grand égoïsme.

- C’est la femme de ton alliance. Si le mariage te donne des droits en tant qu’époux, il t’impose aussi des devoirs, semble dire Malachie. Sache donc que le jour où tu as signé le contrat d’alliance qui te liait à ta femme pour la vie, c’est non seulement devant les hommes, mais devant Dieu que tu as apposé cette signature. Dieu te demandera compte de ton abandon.

2. C’est dans l’esprit que se produit la rupture avant qu’elle ne le soit dans les faits : v 15 (fin).

Prenez donc garde en votre esprit, dit Malachie, car c’est dans ce que vous nourrissez dans le secret de votre cœur que commence le processus qui aboutit un jour à la rupture : Mat 5,27 à 29. Sachons bien que la tentation du divorce, de plus en plus courante en notre temps dans les milieux chrétiens, n’a pas pour seule cause la convoitise. Elle peut aussi être l’aboutissement de problèmes relationnels non réglés au fur et à mesure dans la vie du couple :

- le refus de se pardonner certains torts

- le refus de servir l’autre, l’égoïsme

- le manque de communication : une vie où l’on se croise : plus d’intimité, d’échange, d’amitié : Mal 2,14 parle de l’amie que doit être l’épouse. Amie = confidente privilégiée

- le danger d’une trop grande proximité avec d’autres femmes

- des attentes injustifiées
- etc…

« Un homme, dit Thomas Watson, ne se garde pas chaste en ayant une femme, mais en aimant sa femme. » Prenons garde en notre esprit. C’est là que se trouve la genèse de toutes les ruptures conjugales malheureuses.

3. le divorce est l’une des choses les plus détestables qui soit aux yeux de Dieu : v 16.

Il est détestable pour de multiples raisons :

- pour l’acte de violence qu’il représente pour le cœur de la personne trahie : v 16b. Il n’est pas interdit de penser ici que les larmes versées et les cris poussés près de l’autel, rendant impossible le fait pour Dieu d’agréer les offrandes apportées par les israélites à Son autel, soient ceux des femmes abandonnées par leurs maris qui n’avaient que Dieu vers qui se tourner pour répandre leur chagrin.

« Ces petites pensées « innocentes » qui folâtrent « gentiment » par-delà les frontières du mariage équivalent, au regard de Dieu, aux pensées d’un malfaiteur qui se prépare à assaillir quelqu’un pour le mettre à mal : John Benton. »

- à cause du péché qui, quelles que soient les raisons souvent avancées (incompatibilité d’humeur, monotonie…) en est toujours la cause. Même quand Jésus autorise le divorce, soulignons que c’est à contre-cœur qu’Il le fait, davantage par compassion pour ceux qui souffrent que pour valider un processus justifiable : Mat 19,3 à 9.

- A cause des dégâts, souvent irréversibles, qu’il occasionne dans le cœur et l’esprit des enfants issus du couple. Comment les enfants nés de famille chrétienne pourrait-il apprendre l’amour, la patience, le pardon, la fidélité, la responsabilité s’ils voient leurs parents, se disant chrétiens, se séparer pour cause de refus de les pratiquer ! C’est le couple qui, selon Paul, est la meilleure illustration de la relation profonde qui lie Christ à l’Eglise : Ephés 5,21 à 33

Dieu haïssant la répudiation, Il promet la plus sévère des corrections à qui passerait outre Ses avertissements : v 12 ; Prov 2,16 à 19 ; 6,27 à 35. Que, par Son Esprit, Dieu nous donne conscience de la gravité des péchés que notre société banalise si facilement !

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